Lucas, Charlotte et Pedro

«  Sais-tu disait Gerbier, de quoi est faite la vie de l’homme illégal ? de l’homme de la résistance ? Il n’a pas de feuille d’alimentation. Il ne peut même plus se nourrir à mi-faim. Il dort dans une soupente, ou chez une fille publique, ou bien sur les dalles d’une boutique, ou dans une grange abandonnée, ou sur une banquette de gare. Il ne peut plus revoir les siens que la police surveille. […] Le plus pauvre partage sa maigre ration de pain avec lui. Lui, qui n’a même pas le droit d’entrer chez un boulanger, parce qu’il lutte pour toutes les moissons de la France. » 

Tirée de L’Armée des ombres (Kessel, 1943), cette citation est réellement intéressante car elle montre comment chaque résistant, quel que soit le milieu d’où il vient, doit renoncer à son identité, à son intérêt et à soi-même pour lutter pour la Nation, pour la France. Chacun participe pour aider la France et celui qui lutte pour la France, il doit mettre l’intérêt général et celui de la nation avant le sien, malgré les souffrances qu’il doit endurer.

Pour Kessel, la Résistance, c’est repousser l’ennemi et libérer la France avant tout, quel qu’en soit le coût, et en mettant de côté tous les différends qui opposaient auparavant les Français. Il voit en la Résistance une France soudée, et il représente donc une population où personne n’a rien mais tous s’entraident pour libérer le pays, car c’est l’intérêt de la France et de tous les Français qui passe avant tout.

Les résistants, en s’engageant dans les combats armés contre l’Axe, ont souvent dû laisser quelque chose qui leur appartenait derrière eux.

Ainsi, beaucoup ont renoncé à leur confort, à leur travail ou leurs études, à la manière de Jacques Houlgatte qui, dès le début de la guerre, à 19 ans, quitte sa place au collège Arago pour s’engager et risquer sa vie, ou des adultes qui ont dû renoncer à leur travail, par exemple dans les écoles. Benjamin Maltère, qui était directeur d’école, a en 1943 rejoint la Résistance pour aider aux parachutages. Il en souffrira d’une autre façon encore, perdant le calme de sa vie car pourchassé par la Gestapo, et finira même par être déporté. Ainsi, il perdit bien des choses sur le plan de son intérêt personnel.

On reste bien loin du premier risque encouru en s’engageant dans la Résistance. Les résistants, pour défendre leur pays tout comme leurs idéaux, risquaient très souvent leur vie, et nombreux sont ceux qui finiront par se faire tuer bien avant 1945, lors de leur lutte contre l’Axe et Vichy. Ceux qui ont participé aux combats de la Libération en étaient particulièrement touchés, car toute personne pouvait se faire ôter la vie en un clin d’œil sur le champ de bataille, à l’image de Jacques Houlgatte qui mourut en tant que sous-officier, moins d’un an avant la fin de la guerre,

Cependant, si tous ces résistants mettaient en jeu leur vie et risquaient autant, c’était pour les autres, pour l’intérêt général : les résistants se battaient pour leurs valeurs, leur pays et les valeurs de la France, et l’objectif était de se débarrasser des Allemands et de Vichy pour arrêter de vivre dans l’oppression, pour retourner vers une France plus libre, un pays où ils peuvent vivre normalement.

Finalement, il y avait aussi à gagner personnellement : outre les récompenses décernées par l’État à la fin de la guerre, la médaille de la Résistance et la Croix de Guerre qui étaient données après une participation active et importante contre Vichy et l’ennemi dans son ensemble, chacun bénéficiait de la Libération du pays, lutter pour celui-ci était donc relativement intéressant. Tous, mêmes ceux qui n’ont obtenu aucune récompense, ont reçu la gratitude et la reconnaissance de l’Etat et du pays tout entier. Enfin, certains, au cours de la guerre, ont reçu des postes élevés et la création de Comités Locaux de Libération ont offert des postes attrayants à certains résistants.

On peut donc conclure que s’engager dans la Résistance impliquait cependant de faire passer l’intérêt général avant l’intérêt particulier.

On peut associer la Résistance à une multitude de valeurs, de par sa nature. Je pense cependant que les plus parlants sont le courage, l’altruisme ainsi que le sens du devoir.

Le courage, car tous les résistants ont dû constamment risquer leur vie, ce qu’ils avaient et même leurs proches pour combattre l’ennemi, ils ont dû participer à des actions sous toutes les formes possibles dans le combat contre l’oppression, et beaucoup auront lutté jusqu’à leur mort.

L’altruisme, car pendant toute la guerre, dès 1940, ils ont dû penser aux autres avant eux, à l’action avant la personne, à la Nation avant l’individu. Chacun devait sacrifier quelque chose, chacun devait lutter pour la France et non pour soi, pour que tous puissent vivre dans un pays libre.

Le sens du devoir, car à chaque fois ils « ont dû ». Même si ce n’était pas toujours par choix,  il a fallu que quelqu’un se batte pour le pays, même vaincu. À chaque fois, quelqu’un devait lutter pour l’avenir du pays tout comme celui de ses habitants, car il fallait défendre la liberté et se débarrasser de l’oppression.

Finalement, on peut même relier la Résistance à la devise de la République française : la Fraternité car tous devaient oublier leurs différends et se serrer les coudes, pour retrouver la Liberté de chacun tout comme celle de la France lors des combats de la Libération, et ainsi revenir dans un pays libre et égalitaire.

On peut donc dire qu’avant tout, la Résistance luttait pour la France et était elle-même une partie de la France.